Je ne suis pas coutumière d'utiliser des oeuvres comme illustration d'un discours, ce serait même plutôt le texte qui me sert d'habitude d'illustration. Mais comme le cours de la vie ne suit pas vraiment de logique, je compte bien en faire autant, une fois n'est pas coutume. En effet l'autre jour j'ai bu un bon Morgon (vin rouge du Beaujolais), et en regardant le vin couler de la bouteille dans mon verre (le premier, avec les autres je ne pensais plus aussi profondément bien sûr), cela m'a rappelé un tableau qui aurait parfaitement pu résumer ce moment.
C'est lors de ma dernière visite au Centre Pompidou, exténuante malgré un remarquable sandwich en guise de carburant, que j'ai amassé un certain nombre d'idées d'oeuvres, précisément à illustrer. Et il y en a une devant laquelle je suis passée une première fois et qui m'a fait sourire, puis une deuxième fois et je l'ai notée. J'ai bien fait, parce que mardi soir j'étais bien loin de me souvenir du titre.
Marc Chagall est un des premiers peintres dont je me souviens a voir étudié le travail. J'étais au collège, c'était un mercredi matin, en atelier arts plastiques, nous réalisions les décors de la pièce de théâtre de fin d'année de notre établissement. Nous avions copié plusieurs oeuvres de l'artiste russe sans vergogne, je n'ose pas trop imaginer ce que mon regard d 'aujourd'hui dirait s'il croisait le regard fier que j'avais du avoir le jour où nous avions mis la touche finale. Quoi qu'il en soit, nous avions bien dû nous documenter, et c'était la première fois que j'opérais de façon systématique avec un artiste.
Bref, tout ça pour vous mener à ce Double portrait au verre de vin, daté de 1917-1918, présenté dans la collection permanente du musée national d'art moderne. Et quand j'en regarde la reproduction (que vous pouvez aggrandir en cliquant dessus), un seul mot me vient, ou plutôt un seul son, ahahahaha. Oui, je ris. Vous ne riez pas vous ?
Pourtant eux ils rient, ils viennent de se marier dans une ville à la foid parisienne et russe. Ils volent au-dessus d'un fleuve et d'une église, dans un ciel d'or et de lumière. Le visage de Bella est espiègle, celui de Marc est hilare. Elle porte un éventail qu'on devine raffraîchissant après plusieurs verres de bon vin. Lui, il lève son verre à leur santé. Ses bas à elle sont violets, comme le vin qui marque un tissu. Sa veste à lui est rouge comme le vin quand la lumière le fait briller à travers un verre. Et l'ange qui les survole, il est violet aussi, à la fois couleur sacrée pour les religieux et couleur qui reprend celle des bas de Bella. Hé, mais l'ange en aurait-il profité pour aspirer un peu du vin du verre de Marc ? Et Bella n'a plus qu'un gant, où est passé le second ? Etpourquoi Marc cache-t-il l'oeil droit de Bella ? ©adagp, 2010
Ahaha, mais on s'en fiche, on fait la fête avec eux !
(si vous aimez cette article, faites-le savoir en cliquant ci-dessus !)